Entourages n°4 : Qu'est-ce qu'un "conseiller discours" ? - "Parlementaires harceleurs, on vous connait", nominations
La lettre des métiers politiques - 1 octobre 2021 - n°4
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Une personne, un métier
Qu'est-ce qu'un "conseiller discours" ?
Benjamin Djiane fut la "plume" de Manuel Valls pendant cinq années. Il décortique pour Entourages le métier de "conseiller discours".
Vous pouvez lire la VERSION LONGUE de cette interview sur le site d’Entourages.
- Comment décririez-vous les échanges d’un “conseiller discours” avec le/la politique qu’il accompagne ?
Cela dépend de l'élu ou du ministre et de sa personnalité : certains sont très à l'aise avec l'exercice écrit ou oral, et ont besoin de recherches documentaires, de mise en forme, de stimulation intellectuelle. D'autres ont besoin d'être accompagnés sur l'exercice, sont plus dans l'intuition que dans la formalisation d'une pensée complexe. La "plume" doit s'adapter. Il faut casser l’image d'Epinal consistant à dire que la plume arrive avec le discours ficelé, le pose sur le bureau, et l'autorité le récite… comme lorsqu’Henri Guaino essaye de vous faire croire que Sarkozy était la marionnette de sa pensée. Le texte se construit dans un échange régulier avec la personne pour laquelle vous écrivez, et il/elle sera le rédacteur de sa pensée, devra assumer son propos. La plume s'efface de fait. Mais elle doit avoir la capacité de condenser l'information, de faire un tri, de hiérarchiser... C'est là que la confiance et la proximité ont leur importance, car vous êtes amené à décider en partie de ce que va être le discours.
- Prépare-t-on un discours en fonction de ce qui va être repris sur les réseaux sociaux ?
C'est un ensemble : il faut intégrer le mix média de traitement. Le discours a vocation a vocation à vivre sur différents supports. Il y a des parties que vous allez être amené à diffuser sur les réseaux sociaux, il faut l'intégrer dans la rédaction de votre discours. Il faut des passages utilisables sur les réseaux sociaux. D'autres doivent être facilement utilisables en traitement médiatique, avec de la formule, offrir des punchlines, des condensés de votre démonstration, pour être adapté au rythme médiatique. La meilleure méthode pour que votre pensée ne soit pas trahie est de faire vous-même cet effort de condensation. Et un discours s'adresse aussi à une audience, venue assister à un propos structuré et complet. Il ne s'agit donc pas de monter sur scène balancer trois punchlines et de dire au revoir ! Il faut intégrer tous ces canaux de réception dans votre discours. Sans oublier que le discours est un exercice oral, prononcé, mais qui aura vocation à devenir un texte publié.
- La Guilde des Plumes, dont vous êtes l’un des fondateurs, est-elle une tentative de structurer le milieu des conseillers discours ?
L’initiative est partie d'un constat en 2017, avec quelques "plumes" que je connaissais. Ce métier n'est pas bien connu, et se fait généralement en solitaire. On s'est dit "créons une forme de syndicat professionnel", comme c'est le cas dans d'autres métiers. Cela permet de se retrouver, de partager nos expériences et nos souffrances. Surtout nos souffrances au début : c'est un métier qui est dur, où l'on est souvent à écrire seul, et c'est une expérience généralement peu partagée. Il n'y a pas de formation académique, vous apprenez dans votre coin, et il n'y avait jusque récemment pas de théorisation professionnelle. La Guilde a eu un écho rapide et permet le partage d'expérience.
Benjamin Djiane est également co-fondateur de l’agence Braintrust
Propos recueiillis par Fabrice Pozzoli-Montenay
Vous pouvez lire la VERSION LONGUE de cette interview sur le site d’Entourages
Tribune
« Nous connaissons les députés-employeurs les plus indélicats »
par Mickaël Lévy, collaborateur parlementaire, ancien représentant syndical FO des collaborateurs d’élus à l’Assemblée nationale
A chaque législature, le même sujet revient : les contrats se rompent, les collaborateurs valsent et certains parlementaires sont à un tel niveau de turn-over que la gestion financière de l’Assemblée croit voir double, triple ou quadruple. Il faut savoir que chaque député est assimilé à une TPE-PME sans lien de subordination avec l’Assemblée quant à la gestion RH de ses collaborateurs. Chaque mois, des dizaines de nouveaux collaborateurs jeunes, en sortie d’étude, arrivent tout juste à Paris ou en circonscription et peuvent avoir la malchance de se faire broyer par un(e) député-employeur indélicat.
Chaque représentant syndical de l’Assemblée ou du Sénat échange avec des dizaines voire des centaines de collaborateurs durant tout le mandat. Il est le spectateur, parfois l’acteur ou le lanceur d’alerte, de mille situations et de problèmes différents. Il accompagne les collaborateurs qui le souhaitent lors de leur saisine de la cellule anti-harcèlement ainsi que dans les procédures de licenciement, de rupture conventionnelle ou aux prud’hommes. L’élément saillant est que l’on remarque, au fil du mandat, qu’une trentaine de parlementaires vampirisent une très large partie de ces situations, appelant les représentants des collaborateurs à une vigilance accrue.
Oui : nous faisons savoir le plus largement possible que nous connaissons les employeurs les plus indélicats.
Oui, nous avons chacun, informellement en tête, les noms les moins recommandables : ceux et celles qui ont essoré 15, 20 ou 25 collaborateurs en quatre années et demie.
Oui, nous savons qu’il ne faut jamais envoyer un jeune collaborateur inexpérimenté chez M. X ou Mme X, il en ressortira brisé si par « bonheur » il passe sa période d’essai.
Il faut le rappeler : chaque député est un employeur et, à l’échelle de l’Assemblée nationale, il n’y a ni sur-représentation, ni sous-représentation de mauvais employeurs par rapport au reste de la société. Il faut aussi rappeler qu’il y a des employeurs merveilleux, qui prennent soin de leurs équipes et placent leur bien-être au même niveau de priorité que le reste des objectifs professionnels. Mais il faut dire, dénoncer et empêcher les drames humains que nous avons trop vus.
L’institution ne sera forte que si elle met en place les processus pour que l’on s’y sente bien : des collaborateurs et des députés informés de leurs droits et devoirs, des cellules d’écoute qui fonctionnent, une aide juridique active et confidentielle, un mécanisme lié au crédit collaborateur et à la « surconsommation » de collabs (5 ruptures max de contrats par an par exemple) et un système de lanceurs d’alerte anonymisé pour pallier le cloisonnement et l’atomisation des équipes.
Mickaël Lévy est également fondateur d'une offre de formation initiale et continue pour les collaborateurs parlementaires.
Formation
La Fédération du Parti Socialiste de Paris met en place une école de formation. La séance inaugurale de l'“Académie Socialiste” se fera le 7 octobre avec la participation de l’ancien Premier ministre Lionel Jospin.
L’école souhaite “transmettre la conscience d’une histoire et du temps long, des luttes passées, actuelles et à venir, et de valeurs partagées, donner les clés d’actions pour agir au plus juste et répondre aux défis d’un monde qui change, favoriser l’émergence d’une génération nouvelle”.Une étude de la CNFPT menée dans 33 pays européens montre que la formation des élus locaux est très faible dans tous les pays d’Europe, et tente de répondre aux questions : par qui, comment, sur quoi, pourquoi, voire pour quels objectifs, avec quels moyens financiers et quels résultats, les agents publics locaux et les élus locaux sont-ils formés en Europe ?
Dans l’actu
Franck Attal (ex-dirigeant de Bygmalion) et Fabienne Liadzé ont été reconnus coupable des faits d'usage de faux ; Philippe Blanchetier, Philippe Briand, Marc Leblanc et Guillaume Lambert reconnus coupables des faits "d'escroquerie" ; Fabienne Liadzé, Eric Césari, Pierre Chassat et Jérôme Lavrilleux reconnus coupables d'abus de confiance, et sont tous déclarés coupables de complicité de financement illégal de campagne électorale. Nicolas Sarkozy a été reconnu coupable de financement illégal de campagne électorale.
Un an de sursis probatoire a été requis à l’encontre de l’ancien directeur du cabinet du maire de Tignieu-Jameyzieu. Trois employées affirment avoir été harcelées moralement.
Nominations
Cabinet de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation :
- M. Simon MARTIN est nommé conseiller automobile, nouvelles mobilités, planification énergétique dans les transports et suivi de l'exécution des réformes au cabinet du ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports
- M. Olivier GINEZ est nommé directeur adjoint du cabinet de la ministre de l'enseignement supérieur
- M. Lloyd CERQUEIRA est nommé conseiller spécial au cabinet de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation
-M. Yann JACOB est nommé chef de cabinet adjoint, conseiller en charge des relations avec les élus locaux et les collectivités territoriales
M. Gaultier BRAND-GAZEAU est nommé conseiller en charge du pôle attractivité et du suivi de l'exécution des réformes auprès du ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l'attractivité
Cabinet de la Secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire :
-Mme Nathalie VILACÈQUE est nommé conseillère aux territoires et à l'égalité des chances auprès de la Secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire
-Mme Anne MIQUEL-VAL est nommée conseillère en charge de l'action sociale en faveur des élèvesM. Alexandre LEONARDI est nommé conseiller risques, santé-environnement et transition agro-écologique au cabinet de la ministre de la transition écologique
M. Frédéric BAPTISTA est nommé conseiller politique en charge des élus au cabinet de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion
M. Christophe Le Ciclé devient directeur de cabinet du Président de la Communauté Paris-Saclay
M. Alain MARC a été nommé directeur de cabinet du Président de la Région Normandie
M. Vincent Nuytsa été nommé directeur de cabinet du maire de Brest et président de Brest métropole.