Entourages n°26 : «L'affaire Fillon a contribué à professionnaliser les collaborateurs d’élus»
La lettre des métiers politiques
Cette semaine dans Entourages :
Quels sont les effets de la professionnalisation des collaborateurs politiques ?
L’Open Campus de Brest veut s’approcher des métiers politiques
Podcast, formation réseaux sociaux, petites phrases…
les nominations
N’hésitez pas à partager Entourages auprès de vos contacts LinkedIn, Twitter ou Facebook
«L'affaire Fillon a contribué à professionnaliser les collaborateurs d’élus»
Docteur en science politique, Willy Beauvallet a aussi été collaborateur parlementaire. En 2013, il intègre l’université de Lyon 2 en tant que maître de conférence, et mène ses recherches sur la sociologie des collaborateurs politiques. Il a publié en 2017, « Dans l’ombre des élus » (Presses universitaires du Septentrion). Il revient sur les parcours et les évolutions de ces métiers politiques.
Entourages : Les représentants des collaborateurs demandent la mise en place d'un vrai statut auprès du ministère du travail, qui encadrerait mieux les pratiques. Est-ce imaginable ? Quels sont les obstacles ?
Willy Beauvallet : Oui, cela arrivera tôt ou tard. Mais les élus ne voient pas nécessairement d'un bon œil une diminution de leur autonomie dans la gestion des équipes, leur recrutement, leur rétribution, etc. C'est un héritage historique. Les collaborateurs d'élus sont considérés comme des très proches de l'élu, à tel point que ça s'est confondu avec la sphère domestique. D'une part parce que les collabs ont longtemps été des membres de leur famille, d'autre part, parce qu'à l'origine les premiers collabs salariés étaient associés, dans les catégories C, à du personnel de maison. C'est comme si les collabs étaient en quelque sorte des domestiques des élus. Cette histoire va assez peu avec des catégories universelles, institutionnalisées qui restreindraient cette autonomie des élus. Il y a aussi la crainte d’une bureaucratie croissante. Plus on réglemente le proche collaborateur des élus, plus on réglemente l'activité politique.
Comment décririez-vous l'évolution du collaborateur d’élu ?
L’aspect technique et professionnel a pris en importance. Mais cet aspect n'a pas effacé la dimension politique. Les collaborateurs ne sont pas tous militants, il n'en demeure pas moins qu'ils sont tous au service d'un projet politique. La fonction reste fondamentalement politique et politisée.
Pourquoi la fonction de collaborateur s'est-elle professionnalisée ?
À cause de la professionnalisation de la fonction politique elle-même. Les élus vont donc chercher des professionnels pour les aider à tenir leur rôle. Derrière, on a l’élévation du niveau d'étude des militants et l'émergence des filières politiques. Ces filières mettent sur le marché de l'emploi des jeunes techniciens formés au monde politique.
Quelles ont été les conséquences de l'affaire Fillon sur les collaborateurs d'élus ?
L'affaire Fillon a contribué à légitimer et à professionnaliser la fonction. Elle a une place importante et ne peut être occupée par n'importe qui. D’une part, la sphère domestique n'a de légitimité que si elle est purement bénévole. D’autre part, la sphère professionnelle nécessite des qualités, une normativité. L'affaire Fillon a mené à réguler cette fonction, et donc à la professionnaliser.
Est-ce possible de faire une carrière de collaborateur d'élu ?
Le poste de collaborateur parlementaire représente l'une des étapes d'une carrière de collaborateur politique au sens large. Ils le font pendant quelques années, puis ils travaillent pour un groupe parlementaire (les conseillers parlementaires sont souvent d'anciens assistants parlementaires), enfin, ils travaillent pour un ministre. Dans les cabinets ministériels, des postes sont trustés par d'anciens collaborateurs parlementaires, c'est le cas notamment des fonctions de chef de cabinet et de conseiller parlementaire. On peut aussi aller travailler au service d'un exécutif local (ce sont souvent des fonctions plus stables), ou comme chargé d'affaires publiques dans des groupes publics ou privés. Quelques personnes font des carrières de collaborateurs, car l’élu pour lequel ils travaillent reste longtemps en poste. La trajectoire professionnelle d'un collaborateur d'élu dépend d'éléments de conjoncture. Une partie du prestige de l'élu retombe sur son collaborateur, par exemple. Ou encore, si le collaborateur travaille pour un élu d'opposition qui devient majoritaire, la chance d'accéder à un poste ministériel augmente.
Quel est l'impact de cette professionnalisation sur l'exercice de la politique ?
Une critique revient : l’émergence des collaborateurs salariés aurait conduit à produire des élus qui n'auraient jamais rien fait d'autre. Les élus ne seraient plus représentatifs de la société. Derrière cette critique, réside l'idée selon laquelle on en arrive là notamment parce que des collaborateurs d’élus deviennent élus eux-mêmes. D’un autre côté, faire venir dans le monde politique quelqu'un qui n'y a jamais été a des inconvénients, il ne sait pas tenir son rôle.
Pour qu'un parlement soit puissant, il faut qu'il s'appuie sur des compétences, avec une durabilité de la présence au parlement. Plus le turnover est important, moins les élus peuvent stabiliser leurs compétences et donc tenir une position par rapport au gouvernement. Mais un Parlement n’est légitime que s'il est représentatif. S'il ne parvient pas à se renouveler, il perd en légitimité.
Propos recueillis par Marie Genty
L’Open Campus de Brest veut s’approcher des métiers politiques
Les sept grandes écoles de l’Open Campus de Brest proposent une formation pluridisciplinaire en communication, marketing digital et d’autres domaines. Un cursus qui a vocation à s’intégrer dans un parcours de communication politique selon François Pouletty, dirigeant fondateur.
Entourages : En quoi vos cursus sont-ils intéressants pour des futurs collaborateurs politiques ?
François Pouletty : Notre force réside dans la possibilité de mettre en place facilement des doubles cursus ou des cursus avec spécificités, tout cela au sein du même campus de 6 000m2 d’infrastructures. Nos formations sont pluridisciplinaires et à ce titre peuvent s’intégrer dans un tel parcours. Les métiers de l’accompagnement politique sont 100% compatibles avec notre approche, particulièrement au niveau de la communication et du digital. Sur la question de la communication, Sup’ de Com explore en profondeur trois spécialités : la création, le digital et l’évènementiel, des aspects qu’on retrouve dans les métiers de l’accompagnement politique.
Les futurs collaborateurs sont aujourd’hui face aux enjeux des médias sociaux. Comment abordez-vous ces questions ?
Deux établissements sont dédiés à ce sujet : “Learn it”, spécialisée dans les métiers de l’ingénierie informatique et la “Digital school”, plus particulièrement orientée vers les métiers de la stratégie digitale. Le community management, la créa et le web marketing sont les axes privilégiés de cette école.
Cette dernière option semble la plus adaptée aux enjeux de la collaboration politique…
En effet, mais Learn it permet d’aborder des questions techniques précieuses sur le marché du travail, comme celles qui touchent le SEO (Search Engine Optimization), le SEA (Search Engine Advertising), des formations spécifiques sur les outils tels Google Ads ou les applis. Notre système de cursus complémentaires permet d’enrichir toutes nos formations pour multiplier les chances de décrocher un emploi. On peut ainsi, par exemple, suivre l’enseignement de Sup de Com puis poursuivre dans la Digital School pour obtenir un double master avec des compétences accrues en marketing digital et en community management. Par ailleurs, chaque année, nous organisons une semaine “double compétence” ouverte aux personnes souhaitant se former sur une thématique complémentaire avec des axes Webmarketing & social media, Etudes & développement de solutions digitales et d’autres.
Vous êtes également tournés vers l’alternance. Travaillez-vous avec des collectivités locales ?
Nous sommes ancrés dans le territoire du Grand Ouest et favorisons l’alternance avec des collectivités locales, comme Brest Métropole. Par ailleurs, nos cursus sont axés sur la responsabilité sociale et les projets citoyens. Nous encourageons l’esprit collectif et la transversalité, des notions très présentes dans les métiers de l’accompagnement politique, à travers des opérations de type séminaires d’urgence qui conduisent nos étudiants de différentes écoles à travailler ensemble.
Propos recueillis par Frédérique Maupu-Flament
Un podcast pour les territoires
Léo Dubois, directeur de la communication de Roissy en Brie, lance un podcast intitulé “La Voix des Territoires”, pour mettre en avant “les bonnes actions locales, en parlant aux élus, mais aussi aux collaborateurs, dircabs, dircoms, qui œuvrent dans les territoires”, avec la volonté de “remonter les thématiques locales vers le national”.
Le premier épisode traitera de la désertification médicale, et sera disponible le 3 avril. Les diffusions devraient se faire à un rythme hebdomadaire.
Formation : “Réseaux sociaux : comment mieux communiquer auprès de ses concitoyens ?”
Pour savoir utiliser et maîtriser les réseaux sociaux, mais aussi savoir s’en protéger, l’association “Elues locales” propose une formation en ligne le 29 mars à 18h (inscription gratuite obligatoire) :
https://formations.elueslocales.fr/webinaire-reseaux-sociaux-communiquer-aupres-citoyens
Des collabs pour expliquer le travail en commission parlementaire
Le travail en commission parlementaire reste une activité largement ignorée du grand public. Quitterie de Villepin, candidate aux élections législatives à Paris, souhaite associer ses électeurs à sa future activité parlementaire. Elle demande donc à des collaborateurs d’élus d’expliquer, dans de courtes vidéos, les travaux menés dans ces commissions, pour en “contourner le côté très institutionnel”. Une délibération publique du 17 avril se fera sur le choix de la commission.
“Les petites phrases d’Emmanuel Macron” de Michel Le Séac’h
Les journalistes sont friands de ces “petites phrases”, parfois assassines, parfois révélatrices, que les politiques aiment distiller, et souvent diffusées en dehors de tout contexte. Michel Le Séac’h prend le contrepied de cette pratique, et a consacré un ouvrage à recontextualiser les “petites phrases” d’Emmanuel Macron. De “Je traverse la rue, je vous trouve du travail” à “Les non-vaccinés, j’ai très envie de les emmerder”, l’auteur reprend les circonstances, les destinataires, la portée, le mode de propagation et l’interprétation dominante de ces paroles médiatiques.
Véritable spécialiste du sujet, Michel Le Séac’h avait déjà publié “La petite phrase” aux éditions Eyrolles.
”Les petites phrases d’Emmanuel Macron” est disponible via Amazon.
Nominations
Collectivités
Mathieu Petermann a été nommé directeur de cabinet du maire de Hettange-Grande (57), Roland Balcerzak (SE), dont il était DGS depuis 2020.
Léo Bavoux est nommé conseiller technique au cabinet du président du conseil régional de Bretagne, Loïg Chesnais-Girard (PS).
Emmanuelle Wimart a été nommée directrice de la communication et de la participation citoyenne de la ville de Longjumeau (91).
Pandora Reggiani est nommée collaboratrice de cabinet du maire de Grenoble, Éric Piolle (EELV).
Karine Gautreau est nommée directrice de la communication de la ville de Gonesse (95).
Sénat
Anne Chausse est nommée collaboratrice parlementaire du sénateur de l’Orne, Vincent Segouin (LR).
Gouvernement
Cécile Raquin est nommée directrice de cabinet du nouveau ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, Joël Giraud. Marc Chappuis et Théodore Bidgrain, directeurs adjoints, Anne-Caroline Berthet, cheffe de cabinet, Anna Martins, cheffe de cabinet adjointe, Juliette Fraile, conseillère presse et communication, Éléonore Sixou, conseillère chargée de la communication numérique et de la veille médiatique, et Abigail Giordano, conseiller spécial analyse territoriale et presse.
Clément Tougeron est nommé conseiller suivi des réformes et de la présidence française de l’Union européenne au cabinet du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, Jean-Michel Blanquer, et Jean-Luc Demortier, directeur adjoint du cabinet, égalité des chances et éducation prioritaire.
Thibaut Coiffier, ex-directeur du cabinet de conseil en gouvernance The Arcane, a été nommé chef du département stratégie et coordination interministérielle du Service d’information du Gouvernement (SIG).
Ce qu’elles/ils deviennent
Thomas Bajas, chef de cabinet et conseiller parlementaire du secrétaire d’État chargé de la transition numérique et des communications électroniques, Cédric O, depuis 2020, est nommé directeur de cabinet du fonds d’investissement Founders Future.
Pierre-Antoine Huet-Dufour, conseiller au cabinet de la présidente du Grand Reims, et du maire de Reims, est promu directeur projet mission attractivité.
David Tortel, conseiller en charge des technologies et du numérique, chargé de l’exécution des réformes au cabinet du ministre de l’Intérieur, est nommé associé au sein des équipes cybersécurité de Deloitte France et Afrique francophone, selon Acteurs Publics.
Vous pouvez nous envoyer vos réactions, témoignages, remarques ou conseils à redaction@entourages.media
Nous les publierons (avec votre accord).