ENTOURAGES n°1 : Pour Michel Sapin, ”les collaborateurs parlementaires peuvent être le point d'entrée du virus de la corruption ou du conflit d'intérêt”
La lettre des métiers de la politique - 10 septembre 2021 - n°1
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Interview
Michel Sapin : ”Les collaborateurs parlementaires peuvent être le point d'entrée du virus de la corruption ou du conflit d'intérêt”
L’ancien ministre de l’économie et des finances revient sur les questions de transparence, de corruption et de conflits d’intérêts qui étaient au cœur des “Lois Sapin” I et II. Première partie de notre interview exclusif.
- Entourages : Faut-il renforcer le contrôle des collaborateurs parlementaires, au risque de se priver de compétences ?
La confiance est toujours le meilleur outil au travail. Mais c'est justement parce que, parfois, la confiance a été trompée que l'on est dans l'obligation de mettre en place des mécanismes plus contraignants. J'avoue ne pas comprendre la réticence [des collaborateurs] sur la mise en place d’un code de déontologie. Ils sont un outil fondamental dans le bon fonctionnement de la vie démocratique, au vu de leur compétences, de la préparation, de l'information qu'ils donnent à leur parlementaire, du suivi de l'ensemble des débats… ce sont des gens de qualité, indispensables. Mais c'est souvent le point d'entrée du virus de la corruption ou du conflit d'intérêt. Les représentants d'intérêt, les entreprises, les associations, savent bien que le collaborateur aura plus de temps, d'attention, et éventuellement le plus de faiblesse. Donc les obligations envers les collaborateurs parlementaires me paraissent de bon aloi.
La difficulté, dans l’administration comme pour les élus, voire des ministres, est le problème des aller-retour. D'où vient-on quand on devient collaborateur parlementaire ? et où va-t-on quand on l'est plus ? Même s'ils deviennent collaborateurs de cabinet, la question de leur reconversion, de la suite de leur carrière, est toujours posée.
Des obligations existent, au niveau de l'administration, même dans des postes sans grandes responsabilités, en collectivités territoriales : il ne semble pas anormal en terme de transparence que ça puisse aussi concerner les collaborateurs, pour éviter ensuite tout conflit d'intérêt. La Haute Autorité pour la Transparence de la vie publique (HATVP) a la responsabilité concernant non seulement les ministres, et les parlementaires, avec une capacité d'analyse et une compréhension des obligations qui s'imposent aux collaborateurs sans pour autant gêner dans le recrutement ou le déroulé de carrière des collaborateurs.
- Le député Sylvain Waserman (Modem - La ReM) présenté une série de propositions, concernant les textes de lois influencés par les lobbys, en particulier pour que le « sourcing » soit clairement indiqué. Etes-vous favorable à ce type de démarche ?
Je suis favorable à la démarche, je ne sais pas si constitutionnellement ceci est possible en terme d'obligation. Normalement, le représentant d'intérêt est dans l'obligation de faire savoir sur quel sujet il travaille, auprès de quel type d'institutions, et auprès de quelles personnalités. Il devrait y avoir une empreinte par le côté "représentant d'intérêt". Côté élus, il faut faire attention. Les parlementaires doivent pouvoir travailler librement, sans être continuellement dans le soupçon. Des parlementaires qui s'imposeraient cette obligation iraient dans le bon sens. Mais l'arme la plus fatale, vis à vis des parlementaires, est celle du ridicule. Lorsque l'on voit le même amendement, présenté avec la même faute d'orthographe, et annôné de la même manière par divers députés, on a vite fait d'ôter toute autorité à leur intervention et à la proposition. Il vaut mieux être le plus transparent possible, ça évite soit le soupçon, soit le ridicule.
- Le sourcing est pour l'instant très minoritaire dans les propositions de lois déposées.
Oui, mais peut-être que les assemblées pourraient créer dans leurs règlements ces obligations. Cela permettrait d'avancer librement, sans être forcé par la loi, dans des conditions de constitutionnalité complexes.
La suite de cet entretien dans la prochaine édition de cette newsletter, avec en particulier la question des collectivités territoriales face à la prévention de la corruption.
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Propos recueillis par Fabrice Pozzoli-Montenay
Formation
Le parti socialiste se prépare à mettre en place un centre de formation sous la houlette de Thomas Chevandier (conseiller de Paris) et Colombe Brossel (adjointe à la maire de Paris).
”Tous Politiques”, institut de formation proche de la ReM, dirigé par Serena Borbotti-Frison, va accueillir les prochains candidats aux législatives, ainsi que leurs équipes de campagne.
Nominations
Clément Léonarduzzi a été nommé "conseiller spécial” du chef de l’Etat, après avoir été chef du pôle communication. Avant de rejoindre l’Elysée, il fut directeur de Publicis Consultants.
Edouard Schmidt, ancien conseiller technique presse au cabinet du Premier ministre, a rejoint la mairie de Marseille en tant que collaborateur de cabinet en charge de la communication.
David Foltz, administrateur civil, est nommé sous-préfet, directeur de cabinet du préfet du Finistère.
Laure Trotin, sous-préfète, est nommée directrice de cabinet du préfet du Doubs.
Anne Carli est nommée sous-préfète, directrice de cabinet du préfet de Meurthe-et-Moselle.
Virginie Martinez est nommée directrice de cabinet du préfet des Vosges.
Julien Bouclet, vice-président de l’association de directeurs de cabinets Dextera, devient directeur scientifique du classeur « Les discours de l’élu local » (Territorial Éditions).
Dans l’actu
Ancien directeur de cabinet de Maurice Leroy et ex-dircab adjoint de Jean-Louis Borloo, Mohamed Biha a fait un travail exceptionnel à Kaboul. L'action du commandant de police est qualifiée "d'héroïque" à l'unanimité. "Il nous a sortis de l'enfer". (France Info)
”Accusations de harcèlement au Sénat : la crainte d'une omerta” (Marianne)
“Affaire de la réserve parlementaire : l’ancien sénateur François Grosdidier est renvoyé en correctionnelle” (Anticor)
“Méli-mélo sur le passe sanitaire à l'entrée des centres commerciaux”
Lectures
« Un sociologue à la Commission européenne ». Pendant quatre ans, à la manière d'un ethnographe, le sociologue Frédéric Mérand s'est glissé derrière les façades du Berlaymont, siège de la Commission européenne. Il a partagé les bureaux des femmes et des hommes de l’équipe du commissaire aux affaires économiques Pierre Moscovici, les a suivis dans les couloirs et à la cantine de leur immeuble bruxellois, a participé à leurs réunions.