Entourages n°167 : Démocratie participative : quand l’IA se mêle au débat • Recrutements • Nominations
La lettre des métiers politiques
Au sommaire de cette édition :
⚛️ L’IA facilite-t-elle ou édulcore-t-elle le débat démocratique ? La Commission nationale du débat public (CNDP) fait appel à un outil d’Intelligence Artificielle pour “simplifier” l’accès à l’information dans le débat sur les futurs réacteurs EPR2 au Bugey. Mais des questions se posent sur le respect du contradictoire et le paramétrage des documents utilisés par l’IA. Un sujet qui pourrait concerner les “conventions citoyennes décentralisées sur l’identité française” souhaitées par François Bayrou.
Nous avons interrogé David Chevallier (CNDP), Marthe Nagels (Make.org), Stéphanie Wojcik (UPEC), et Marion Rivet (Réseau Sortir du nucléaire).
🤖Cette même IA veut s’adresser aux collectivités locales pour rendre plus accessibles les conseils municipaux métropolitains et régionaux, les débats PLU et les concertations locales.
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Démocratie participative : quand l’IA se mêle au débat
La Commission nationale du débat public (CNDP) est chargée de l’organisation de la concertation sur le projet de construction de deux réacteurs EPR2 à la centrale nucléaire du Bugey. Pour la première fois, elle a fait appel à un outil d’Intelligence Artificielle (IA), dénommé Panoramic et déployé par la société Make.org. Une expérimentation qui pourrait ouvrir la voie à une utilisation répétée de l’IA pour accompagner les concertations citoyennes.
Mais le dispositif soulève aussi des questions et des inquiétudes sur la représentation démocratique. Notre enquête sur un outil qui pourrait devenir inséparable des consultations citoyennes locales, et des “grands débats” souhaités par le gouvernement.
Avec les interventions de David Chevallier (CNDP), Marthe Nagels (Make.org), Stéphanie Wojcik (UPEC), Marion Rivet ( Sortir du nucléaire).
Au Bugey, le nucléaire fait partie du paysage depuis 1965. En 2023, la construction sur le site de deux nouveaux réacteurs EPR2 est annoncée, qui devraient être mis en service en 2042. Dans la région, située entre Lyon et la frontière suisse, la décision a ému des habitants et des militants écologistes. La centrale est construite sur les bords du Rhône, et certains s’inquiètent des conséquences sur environnement et la sécurité.
Une consultation publique est organisée depuis janvier 2025 par la Commission nationale du débat public (CNDP). La démarche présente une nouveauté: la mise en place d’un outil d’Intelligence Artificielle, Panoramic. « Make.org nous a proposé cet outil d'intelligence artificielle, que nous avons orienté uniquement sur les débats et concertations préalables portés par la CNDP » précise David Chevallier, délégué CNDP en Auvergne-Rhône-Alpes. « L'intérêt est de maitriser le corpus, de ne pas avoir tous les documents de la terre produits sur le nucléaire, mais d’être centré sur les débats publics et concertations préalables qui ont eu lieu depuis 2005. Nous avons fourni une base de près de 1000 documents, et nous continuons à l'alimenter, dès qu'un document est produit dans le cadre du débat public. Par exemple les cahiers d'acteurs, avec les comptes-rendus de nos réunions ».
L'IA est ainsi utilisée pour analyser et organiser les documents produits par la CNDP. Elle sert en particulier d’outil de recherche, accessible à tous, pour poser des questions et obtenir des réponses à partir des documents disponibles. Car une IA « fermée », comme c’est le cas ici, « n'ira pas chercher des informations ailleurs sur Internet, contrairement à ChatGPT par exemple » indique Marthe Nagels, responsable Démocratie Participative chez Make.org. « La CNDP est garante de la qualité du débat. C'est apprécié par les citoyens qui sont dans un espace de confiance avec des documents validés par la CNDP, qu'ils peuvent consulter. On voit qu'ils passent en moyenne cinq minutes sur la plateforme" estime-t-elle. Car une IA ne peut travailler qu’à partir des données lui sont fournies, ce qui pose la question du respect du débat contradictoire démocratique.
"On peut s'interroger sur les sources que l'IA va utiliser, comment se fait le paramétrage... si l'outil peut être une bonne idée, comment veiller à ce que le débat respecte les règles du contradictoire ?" s’interroge ainsi Stéphanie Wojcik, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris Est Créteil.
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