Entourages n°16 : Franck Louvrier « le conseiller communication a le final cut » ; le casse-tête du congé maternité d'une collab ; notre questionnaire lecteurs ; nominations
La lettre des métiers politiques - mercredi 5 janvier 2022
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Métier
Franck Louvrier : « le conseiller communication a le final cut »
Il a occupé durant 15 ans les fonctions de conseiller en communication de Nicolas Sarkozy, y compris quand ce dernier était Président de la République. Il a également été président de Publicis Events, et vice-président de Publicis Consultants. Actuellement maire de la Baule-Escoublac, Franck Louvrier connaît tous les rouages et le rôle central de ce collaborateur au sein d’une équipe.
Pour un directeur de la communication, comment s’orchestrent les échanges avec les autres membres de l’équipe ?
Le poste de directeur de la communication est transversal, c’est même le plus transversal des postes de collaborateurs. La communication appartient à tout le monde. Quel que soit le sujet abordé, il y a toujours un volet communication. On travaille avec le chef de cabinet, le métronome de la campagne, avec le directeur de campagne, les conseillers thématiques, car ils ont à faire comprendre leur matière, et le job du conseiller en communication est de vulgariser ce propos. Pas un seul texte ne doit sortir sans être vu par le conseiller en com. C’est lui qui a le final cut.
Y compris sur les discours du candidat ?
Bien sûr. La plume travaille en amont sur un texte sur lequel le candidat doit se sentir à l’aise. Ça ne fonctionne pas toujours. Le conseiller en com doit pouvoir dire « Ok, c’est très beau ton truc, il y a une belle sonorité mais c’est incompréhensible ! Ou alors: ce n’est pas la forme dont on a besoin en ce moment. »
Il intervient donc au premier chef sur la forme ?
Oui, car le fond tient la forme. La plume sait écrire, c’est son job. Mais celui du directeur de communication c’est de rendre clair un discours, de le simplifier. Il doit tout vulgariser pour que le fond soit compris. Et puis, je le répète c’est un poste central. Tout passe par le tamis de la com.
Être constamment près du candidat, c’est l’ADN du métier ?
Si on ne colle pas à l’événement, on ne le comprend pas. Or, en campagne, l’événement c’est le candidat. Un conseiller en communication qui reste dans son fauteuil à regarder son candidat à la télé, je lui conseillerais de changer de métier ! Si tu es à Paris et que ton candidat est en Province et qu’il se passe quelque chose lors du déplacement, je ne vois pas comment tu peux réagir assez vite. L’objectif n’est pas de charger le candidat de difficultés mais de régler les problèmes avant, de trouver des réponses et des solutions. Nicolas Sarkozy me disait toujours « Écoutez, ne m’embêtez pas avec vos problèmes… apportez moi des réponses ! » Et il avait raison. Nous sommes des apporteurs de solution.
Cela suppose un talent à savoir anticiper ?
Oui. C’est le nerf de la guerre. Préparer en amont pour éviter les mauvaises surprises. Je n’ai jamais appelé un journaliste pour lui demander quelles questions il allait poser. Un bon chargé de com doit déjà connaître les questions ! Mieux vaut anticiper. Comme on dit « préparation difficile, guerre facile ». C’est un travail qui demande beaucoup plus de préparation que de réactivité. Plus on prépare, moins on a de surprises. Il faut être très bon sur les thématiques.
Parmi ces moyens, les réseaux sociaux ont une place prépondérante. Vous avez été précurseur à votre époque.
Quand je suis arrivé à l’Elysée (en 2007), il y avait plus de gens qui s’occupaient de la presse que des réseaux sociaux… quand j’en suis parti (en 2012), c’était le contraire !
Avez-vous senti tout de suite l’intérêt de ce nouveau média ?
Non. L’élément déclencheur a été la phrase « Casse-toi pauv’ con ! » (prononcée lors de la visite de Nicolas Sarkozy au salon de l’agriculture le 23 février 2008). Nous avons alors vu que nous n’avions pas assez de professionnalisme pour répondre à la naissance de la parole sur les réseaux sociaux. À mon arrivée, il y avait un élysée.fr, héritier du minitel. Ça vivotait.
Quelles sont les qualités d’un bon conseiller en communication ?
Il faut être hyper curieux et s’intéresser à tous les sujets car le candidat est attendu sur tous les terrains. On ne doit pas s’intéresser qu’à l’éducation ou au sport, à la culture ou à la sécurité… il faut s’intéresser à tout. Il faut aussi avoir le goût de la vulgarisation. Le rôle du politique c’est de transformer une information en décision et celui du communicant de transformer cette décision en compréhension. Un bon dircom a la capacité de passer d’un sujet complexe à un propos compris par les gens. L’approbation ne vient qu’après. Qui va approuver une mesure non comprise ? Et on n’y arrive pas toujours. Le moment, le support, l’humeur du moment, la concurrence qui peut être meilleure.
Dans ce panorama très technique, faut-il être militant pour être un bon conseiller en communication ?
Non. Il faut d’abord être un pro de la communication. Il m’est arrivé de recruter des personnes dans mon équipe qui appréciaient Nicolas Sarkozy sans être des militants de droite. En revanche, il fallait qu’ils soient à l’aise avec le candidat. Le militantisme est loin d’être la porte d’entrée obligatoire pour accéder à ce poste. Quand on dit à un candidat, « adresse toi plutôt à telle chaîne de télé », ou encore « parle de cette thématique car c’est une préoccupation des Français », c’est un constat technique pas une parole militante.
Pourtant, on imagine mal un conseiller qui ne partage pas les convictions de son candidat.
C’est toute la subtilité de l’affaire. Parce que si tu n’es pas passionné tu n’as pas l’énergie. C’est comme de vendre du café sans aimer ça. Mais tu peux être passionné sans être militant. J’ai rarement vu quelqu’un communiquer pour un candidat qu’il n’aimait pas. Ce que cherche un communiquant ce sont les meilleures voies et moyens pour qu’on comprenne et adhère à la démarche de son candidat. Ce n’est ni idéologique ni doctrinaire. Mais le pouvoir de conviction est toujours affectif.
Et les écoles, quelle est leur place dans votre recrutement ?
Je me moque des écoles ! C’est bien d’en avoir fait car elles apportent la connaissance mais elles ne transmettent pas la passion. La force d’un individu c’est sa richesse. Si toutes les personnes qui avaient fait telle école étaient bonnes, on recruterait au même endroit. Ce n’est pas comme ça que ça se passe.
Propos recueillis par Frédérique Maupu-Flament
Droit
Congé maternité : l’impossible remplacement d’une collaboratrice de cabinet
L’article 3-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires applicables à la fonction publique territoriale prévoit le recrutement par les collectivités d’agents contractuels pour le remplacement temporaire de fonctionnaires ou de contractuels qui, notamment, seraient en congé maternité. Il précise bien cependant dans son premier alinéa qu’il s’agit là de faire occuper les emplois permanents des collectivités.
Quid alors du remplacement d’une collaboratrice de Cabinet en congé maternité qui n’occupe justement pas un emploi permanent de la collectivité au sens de cette loi mais un emploi spécifique, de Cabinet ?
Le décret n°87-1004 du 16 décembre 1987 relatif aux collaborateurs de cabinet des autorités territoriales est malheureusement muet sur ce point, comme l’article 110 de la loi du 26 janvier précitée qui pose la possibilité des recrutements par l’autorité territoriale d’un ou plusieurs collaborateurs de Cabinet.
Ainsi, tandis qu’il existe une protection contre le licenciement de la collaboratrice de cabinet en état de grossesse (par application de l’article 41 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux contractuels des collectivités et qui s’applique aux collaborateurs de cabinet dans les conditions de son article 1er), il n’est pas prévu de remplacement de celle-ci.
La conclusion d’un contrat à durée déterminée qui correspondrait à celle de l’absence d’une collaboratrice ne paraît pas exclue - en ce que l’article 110 de la loi du 26 janvier 1984 évoque une liberté de recrutement et de fin de fonctions et l’article 6 du décret une expiration du contrat « au plus tard en même temps que le mandat » - mais il reste néanmoins une difficulté : celle du plafond du nombre de collaborateurs de cabinet posé par l’article 10 du décret de 1987 et qui varie pour mémoire en fonction de l’importance démographique de la collectivité.
Or, on a pu relever que la doctrine ministérielle interprète de manière très stricte ce plafond, par exemple en considérant qu’il ne fait pas référence à un nombre d’emplois budgétaires (auquel cas un emploi pourrait par exemple être partagé entre plusieurs personnes) mais à un nombre réel de personnes, quelle que soit leur durée de service (JOAN du 22 juin 1998, réponse à la question écrite n° 11126 du 9 mars 1998).
De ce fait, si le plafond est déjà atteint, on peut douter de la possibilité de recruter un collaborateur de cabinet supplémentaire pour le temps du congé maternité, même pour un remplacement temporaire, d’autant que l’article 10 du décret du 15 février 1988 prévoit un maintien par la collectivité de la totalité de la rémunération de la collaboratrice pendant cette période.
Tel est d’ailleurs le sens d’une récente réponse ministérielle récente qui conclut à la nécessité d’une modification du statut pour pallier cette situation qui préjudicie nécessairement au bon fonctionnement du Cabinet (JOAN du 31 Août 2021, réponse à la question écrite n° 39516 du 15 juin 2021).
Marjorie Abbal - Avocat à la Cour- cabinet Seban & Associés
ComPol
Les voeux politiques, exercice obligé de ComPol
Cette nouvelle année aura vu Yannick Jadot nous souhaiter une “bonne annéee 2027”, Eric Zemmour devant un buste de Napoléon sur YouTube, et le président de la République nous adresser des voeux au parfum d’élections. L’exercice des voeux est incontournable, et permet aux candidats de réaffirmer leurs objectifs, tout en s’adressant à leurs militants. “C’est un marronier politique” reconnaît Philippe Moreau Chevrolet, qui dirige l’agence MCBG, “mais un politique ne peut pas ne pas le faire. C’est un rituel, vu comme une façon de se présidentialiser, de faire passer son message, que les candidats considèrent bien sûr comme très important.” Certains essaient de se distinguer, comme Arnaud Montebourg qui diffuse un message vocal, ou Christiane Taubira qui scande un poème de presque candidate. Mais difficile d’émerger dans le flot de voeux qui déferle en début d’année dans les boites mails et sur les réseaux.
A lire aussi :
Dans Le Parisien (sur abonnement) : “Stefanini, Knafo, Kohler, Olivier… ces conseillers dans l’ombre de la campagne présidentielle”
Dans Le Journal du Dimanche : ”Pourquoi les mèmes sont de redoutables objets politiques”
”Pour Maxime Dafaure, on peut même parler de Great meme war (ou "grande guerre des mèmes"), dans la mesure où les milieux conservateurs et d'extrême droite utilisent largement les mèmes comme des armes de guerre communicationnelles, afin de faire passer certains discours sur les boards et les réseaux sociaux - pour toucher des publics plus larges.”
Enquête de lectorat
Après 16 numéros, nous voulons prendre un peu de recul et évaluer, avec vous, si la ligne éditoriale d’Entourages correspond à vos attentes. 2022 sera une année d’évolutions pour notre titre.
C’est pourquoi nous avons créé un petit questionnaire pour connaître vos réactions, vos attentes, votre satisfaction.
Vous pouvez répondre en quelques minutes à cette adresse :
https://forms.gle/5EGSJsyZnGRQYPqp6
Vous avez peut être raté nos 5 articles les plus lus depuis septembre 2020 :
Nominations
Collectivités :
Clément Fabreguettes est nommé directeur adjoint de cabinet du président du conseil départemental de la Somme, Stéphane Haussoulier (DVD), dont il était conseiller technique depuis 2020.
François Kuss est nommé directeur de cabinet du président du conseil départemental du Lot, Serge Rigal (DVG).
David Bianchi est nommé collaborateur de cabinet de la présidente du conseil départemental de la Lozère, Sophie Pantel (PS), collectivité dont il était chargé des assemblées depuis mai 2021.
Salim Bouchama est nommé collaborateur de cabinet du maire de Dammarie-les-Lys (77), Gilles Battail (LR).
Vérane Guérin est nommée directrice de cabinet de la présidente de l’agglomération Sud Sainte-Baume (83), Blandine Monier (DVD).
Jacques Duquenne est nommé collaborateur de cabinet du maire de Béthune (62), Olivier Gacquerre (UDI).
Dorothée Rulence est nommée cheffe du service événementiel et audiovisuel du conseil départemental de l’Oise.
Gouvernement
Le cabinet de Jean-Baptiste Lemoyne, ministre délégué chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie, et depuis la démission d’Alain Griset également chargé des petites et moyennes entreprises, évolue largement. Ses fidèles restent en place avec des fonctions parfois revues : Axel Cruau est nommé directeur de cabinet, Laurent Doraï, directeur adjoint, chargé du pôle politique, parlementaire et territorial, Nathalie Fortis, cheffe de cabinet, conseillère chargée de la communication, François Courant, conseiller chargé des affaires diplomatiques, consulaires et éducatives, de la francophonie et du développement, et Arthur Lepel Cointet, chef adjoint de cabinet.
Des membres du cabinet d’Alain Griset complètent l’équipe : Louis Margueritte devient directeur adjoint de cabinet, chargé du pôle petites et moyennes entreprises, commerce, artisanat, professions libérales et consommation, Victoire Vandeville, directrice adjointe, chargée du pôle tourisme et soutien économique.
Nicolas Bays est nommé chef de cabinet du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, Jean-Michel Blanquer.
Hélène Courades est promue cheffe de cabinet, chargée des relations avec les élus locaux et les collectivités au cabinet de la ministre déléguée chargée de l’industrie, Agnès Pannier-Runacher.
Morgane Le Poul, ex-conseillère presse et communication d’Olivier Véran (2021), est nommée conseillère communication et presse au cabinet du secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques, Cédric O.
Sam Dautrevaux, chef adjoint de cabinet, conseiller politique, est promu directeur adjoint du cabinet de la ministre déléguée chargée des sports, Roxana Maracineanu. Édouard Schmidt, conseiller du maire de Marseille depuis août, et ancien conseiller technique presse du premier ministre (2019-2021) est nommé conseiller presse et communication digitale au cabinet du ministre des solidarités et de la santé, Olivier Véran.
Étienne Melliani est promu chef de cabinet du ministre délégué chargé des transports, Jean-Baptiste Djebbari, et Thomas Rossignol, directeur de cabinet du directeur général de l’AFD, est nommé conseiller spécial.
Toute l’équipe d’Entourages vous souhaite une excellente année 2022 !